L’école samedi matin
30-09-2007 par Horacio GonzalezIl semblerait que l’annonce du ministre de l’Education Xavier Darcos sur la suppression des heures de cours du samedi dans les écoles a fait courir des rivières d’encre (ou plutôt de bytes) sur internet. Le débat ne m’intéresse pas trop, car j’ai une opinion assez tranché sur le sujet, et je trouve la plupart d’arguments (autant d’un camp que de l’autre) assez peu convaincants et assez politisés. Cela m’a au moins permit de découvrir, entre autres choses, l’existence de professions aux noms exotiques tels que chronobiologiste ou chronopsychologes, alors ce n’est pas du temps perdu pour moi.
Moi je suis espagnol, et en Espagne le samedi matin il n’y a pas école. En fait, en Espagne les enfants ont le même rythme journalier que leur parents, ils ont école du lundi au vendredi. C’est simple, c’est plus facile pour les parents, et ça permet aux familles d’avoir leur temps de repos ensembles.
En arrivant en France, j’ai découvert avec surprise la semaine scolaire à la française, les mercredis libérés et les samedis travaillés. A l”époque ça ne me dérangeait pas, car je n’avais pas d’enfant. Mais des que je me suis retrouvé dans la position de père j’ai détesté cette organisation et j’ai profondément regretté le rythme espagnol.
Pour vous mettre en situation, je suis divorcé, ma fille habite avec moi, et sa mère habite à Lorient, à 150 km de chez moi. Je travaille, avec une horaire normal de lundi à vendredi. D’abord il y a les mercredis, journée que selon ces chonobiologistes, chonopsycologues y autres chronospécialistes sert au repos des enfants. Sauf que ma fille elle se repose pas, car je suis bien obligé de la réveiller à 7h30 et la déposer dans un Centre Aéré de la Mairie, et la recuperer vers 18h, aussi crevée qu’un jour d’école normale, ou même plus…
Oh oui, pour ces enfants dont parents qui peuvent se permettre de se mettre à temps partiel, ou qui ont la chance d’avoir des grands parents à côté, pour eux le mercredi est peut-être une journée de repos. Mais pour tous ceux dont les parents, comme moi, ne peuvent pas libérer les mercredis et dont les grands parents ne peuvent pas les prendre en charge, le mercredi devient une journée comme les autres, où il faut se lever, ou il faut sortir, ou il faut avoir un rythme soutenu.
Ensuite il y a le casse tête du weekend. Ma fille a envie de voir sa mère. Lorsqu’elle était en maternelle, on s’arrangeait pour qu’elle puisse être avec sa maman du vendredi soir au dimanche soir, ça lui faisait deux journées par semaine avec sa mère, c’est pas trop, je pense. L’année dernière, en cours d’année, ma fille est passé de maternelle à CP, et une des premières choses que la nouvelle instit m’a dit, d’un tone grave, c’était :
Déjà je trouve dur de devoir réveiller ma fille le samedi matin, lorsqu’elle est fatiguée après la longue semaine d’école et centre aéré, mais cela grâce à ces trois heures de cours du samedi matin ma fille perd passe à peine une journée par semaine avec sa maman. Je la récupère à la sortie de l’école samedi midi, un repas rapide et en vitesse dans la voiture, cap vers le sud. Une heure et demie plus tard déjà samedi après-midi, une petite fille épuisée retrouve sa mère. Et à peine 24 heures après, chemin de retour, car le lendemain une nouvelle semaine de école et centre aéré démarre.
Je me demande combien de ces chronoprofessionnels ont des enfants, et combien d’entre eux font partie des familles non traditionnelles (parents séparés ou divorcés, familles recomposées). Je suis prêt à parier que pas beaucoup, car c’est bien beau de parler du rythme biologique de l’enfant d’une façon théorique lorsqu’on n’est pas vraiment concerné par le problème et lorsqu’on voit des enfants seulement dans leur côté apprenant.
Que diraient ces chronopersonnes s’ils savaient que la France c’est un des rares pays au monde où on a ce type de rythme ? Vont il avoir le culot de me dire qu’en Espagne, avec la semaine de lundi au vendredi, les enfants se portent moins bien qu’ici ? Qu’ils apprennent moins ? Que le rythme chronomachin des petits espagnols est altéré ? Car j’ai grandi là bas, j’ai suivi ce rythme, j’ai vécu ça toute ma vie et je peux témoigner que ces argument sont faux. Mais c’est quoi ce témoignage comparé avec un étude analytico-statistique d’une chronoexpert ?
Je ne suis ni pro-Sarko ni anti-Sarko, déjà car je ne peux pas voter. C’est peut-être pour ça que les arguments politiques me fatiguent, et les débats partisans me dégouttent. Pour moi l’important est comme les décisions des politiciens vont affecter la vie des gens, sans souci si ces politiciens sont d’une couleur ou d’une autre. Et je trouve que cette décision de M. Darcos est une des meilleures qu’on puisse prendre. Ca fait plaisir que pour une fois les décisions soient basés sur le bon sens…
P.S. : Il semblerait que je ne suis pas le seul à penser comme ça, comme je découvre avec plaisir dans l’excellent Samedi sans école 🙂